lundi 28 février 2011

Choix

Au milieu de l’infiniment petit
De l’infiniment grand
Qui l’un et l’autre nous dépassent
Le mégalo prendra un vaste continent
Le dépressif aura une crise d’angoisse
Perché au bord du vide d’une étoile suicide
Le parano s’armera de défenses
Faisant de sa planète un oursin véritable
Le psychopathe armé violent et redoutable
Fera brûler la sienne en l’aspergeant d’essence
A moins qu’il ne préfère la dissoudre à l’acide
Loin de là mais toujours très près de son nombril
Perdu dans ses pensés au bord de l’océan
Descendu de son fil posé sur son séant
L’homme sensé prendra une île
Pour en faire le tour plus souvent



dimanche 27 février 2011

The last dance

La mer est revenue danser
Mais ces golfs ne sont pas clairs
Sa danse est un sabbat d’enfer
Où hurlent les courants d’air frais

Prends dans tes bras pour un tango
Le corps voluptueux de la vague
Il ne s’agit plus là de drague
Car à ton corps c’est un écho

Prends dans tes bras pour une valse
Cette trombe où tout tourne rond
Par la tourbe et le tourbillon
Faites que toujours tu l’enlaces

Prends dans tes bras pour un mambo
Les embruns qui là s’éparpillent
Clochettes de la séguedille
Sous un nuage sombrero

Prends dans tes bras pour la samba
La houle ondulante qui roule
Sous tes mains le fessier se moule
Ses hanches penchent sous tes doigts

Prends dans tes bras la mer immense
Nourricière injuste et terrible
Sacrifie donc ta dernière île
Au plaisir d’une ultime danse




vendredi 25 février 2011

Bastion

Une île est une forteresse
On ne peut y poser les pieds
Et l’on ne peut y faire un geste
Sans qu’un accord nous soit donné
Une île est une forteresse
On ne peut y venir à pied
On ne peut y poser les fesses
Et la mer est de son côté
Mais à notre époque il ne reste
Plus de bastide où se cacher
Ni plus aucune forteresse
Pour notre amour à protéger
Car si jamais ces citadelles
Se lassent d’être piétinées
S’il vient à leur pousser des ailes
Nous n’aurons plus rien à rêver




jeudi 24 février 2011

Mea poulpa

L’attente accule le temps
Sang Sue de tous les pores
Où les marins titubent
Guettés par les succubes
Jetés tels des corps-morts
Pieuvre qui vampirise
Et calamars géants
Qui ventousent et qui gisent
Aux abysses du sang
D’un océan de sang
Qui coure et qui bouillonne
Qui parfois court-bouillonne
Ne cuit jamais à temps
Ne paie jamais comptant
Et n’est jamais content
Mais toujours t’illusionne
Un peu en attendant
Elle est le mysterium
Contre l’oreille de l’homme
Coquillage sans image
Où la mer bat son sang
Sans les vagues sans le vent
L’attente occulte ment
 

 

Horizon

Comme ils sont heureux ceux restés au creux des terres
Sans jamais embrasser cet horizon si large
Si rempli de promesses qu’il en est délétère
Causant tant de folies de morts de ses mirages

Comme ils sont heureux ceux dont l’imagination
N’a jamais dépassé le clocher du village
Les pots de géranium posés sur leur balcon
Un au-delà meilleur s’ils ont été bien sages

Comme ils sont heureux ceux qui n’ont jamais vu d’îles
Jamais déambulé tout au long des pontons
Rêvant à autre chose qu’au moteur imbécile
Qui dort sous ses chevaux tapi dessous le pont

Ils sont heureux ceux qui sous les astéroïdes
Pénètrent leur copine de leur sexe bandant
Larguant deux cent millions de spermatozoïdes
Sachant que l’arrivée verra un survivant

Comme ils sont heureux ceux qui croient qu’en politique
Ce n’est pas la même chose pourtant c’est évident
Celui qui se balance tout en haut du portique
Pour sacrifier les autres n’hésite un seul instant

Comme ils sont heureux ceux qui regardant la lune
N’y voient qu’un satellite un peu bouffé aux mites
Alors que tout poète y monte à la tribune
Rompu à l’acrostiche ou simple néophyte

Alors soit donc heureux homme de cette Terre
Ou malheureux selon que tu tiens dans ta main
Ta naissance à un bout ou l’autre de la Terre
L’aptitude à aimer ou haïr ton voisin




mercredi 23 février 2011

Florette

J’ai des fleurs
Z-en pagaille
Des odeurs
Qui défaillent
Du pollen
Fin qui pique
Ta narine
Allergique
Des couleurs
Des ajoncs
Des genêts
Et des joncs
Jaune et or
Et j’adore
La bruyère
Améthyste
Jardinière
Du fleuriste
Qui vient faire
Des parterres
Riant air
Vent qui glisse
Où la terre
Etait triste
Aussi les
Queues de lièvres
Aux marais
Ont la fièvre
Onduleux
Filiforme
Et macro-
Céphalique
Si doux que
C’est hors norme
Douceur tant
Hystérique
Que c’en est
Bien gênant
Dans le noir
Ce grand phare
Devenant
Si phallique


 

mardi 22 février 2011

Inutile

La mer ressemble au ciel et le ciel à la mer
Devinez qui s’agite entre ces deux mouvances
Perché sur une pierre en hurlant à la chance
Alors qu’il suffirait d’interroger la Terre

C’est ce petit bonhomme atterri du cosmos
En atomes épars parmi un vent d’étoiles
Se retrouvant nager dans l’oceano nox
Amnésique et sans but à se tourner les poils

Il ne peut accepter l’idée pourtant précise
Cause de tant de bile qui lui mine le teint
Concept qui ne peut être qu’une triste sottise
L’idée qui l’obnubile c’est qu’il ne sert à rien



dimanche 20 février 2011

Proella

Une croix s’est posé comme un oiseau blessé
Et pourtant ses deux ailes sont largement ouvertes
Elle s’est enraciné dans la douleur offerte
Profitant des souffrances faiblesses fatiguées
Cet oiseau a des serres cachées sous son plumage
Son langage est douceur mais son bec est crochu
Il réchauffe ton cœur de mensonge en présage
Pour que tu n’aies plus froid mais toi tu restes nue
Tout serait illusion s’il n’y avait le naufrage
Qui vient de voir périr celui que tu aimais
Le flambeau de la foi n’est qu’un simple mirage
La seule vérité est que toi tu l’aimais



Tissage

Tiré entre mes doigts le doux fil des nuages
Se tend alors le temps s’enroulant au fuseau
En souvenir présent dans mes vieux cartilages
Tourne à l’orage et dans mes os son eau
En trombe se répand et inonde les pages
Du livre de ma vie de ce livre d’images
Que j’ai un peu subi que j’ai un peu choisi
Dont il était aisé de tourner les feuillets
Avant que mon ramage ne tourne en radotage
Mon pull est terminé j’ai fini mon veuvage
Voilà est arrivé le jour où l’endosser
Pour qu’il me tienne chaud dans mon dernier voyage


samedi 19 février 2011

Boîte aux lettres

La brume a laissé un espace
Au ras du sol juste la place
D’y glisser un petit mot doux
Pour toi qui sur le continent
Alèse des trous incontinent
Pour quelques sous loin de ton île

La brume a laissé un espace
Au ras du sol juste la place
D’y glisser un petit mot doux
Pour toi qui sur l’océan fou
Porte des containers débiles
Pour quelques sous loin de ton île

La brume a laissé un espace
Au ras du sol juste la place
Pour un tout petit mot fébrile
Pour toi au flot de ton usine
A congeler thon et sardines
Pour quelques sous loin de ton île

Pour ton retour moderne Ulysse
La brume a laissé un espace
Au Raz de Sein juste la place
Pour que les deux mains tu y glisses
Douces promesses en délices
Pour encor un petit marin




vendredi 18 février 2011

Maison d'île

Je suis maison des îles
Je suis en bleu et blanc
De mer Egée d’Ouessant
Le fard est lourd à mes paupières
Ma robe est blanche sur la pierre
Et quand le vent me la soulève
C’est pour découvrir mon derrière
Moi Vénus callipyge je t’offre
Plus qu’un trésor en son vieux coffre
Mais tout l’intérieur de ma chair
Pour t’abriter ce n’est pas cher
Que le prix d’un ravalement
Si je te trompe avec le vent
Et si parfois la mer me lèche
A cause de ma peau de pêche
C’est que le devant vaut l’arrière
De quoi te plains-tu grand enfant
Tu es quand même mon amant


jeudi 17 février 2011

Nuit de tempête

Flash d’embruns
Sur rochers bruns
Crash de brume
Dont la nuit fume
Des murs de sel
Mouillés de lune
S’allument au loin

Sans bien savoir
D’où dans le noir
Le bruit entoure
Le bruit rend sourd
La pluie ruisselle
Gonfle l’écume
Comme un chagrin

Tel un derviche
Phare s’en fiche
Il tourne et vire
Prêt à périr
Pour cette belle
Nuit d’infortune
Au bruit de train

Des diamants verts
Sautent en l’air
Et des cristaux
Font des éclairs
Alors Cybèle
Déchire sa chair
De ses deux mains

L’orage gronde
Jette sa fronde
Et le Cyclope
En lycanthrope
Devient mortel
C’est pas Cythère
Vraiment ça craint




mardi 15 février 2011

Au phare et au moulin

C’est quoi ce moulin sans sa toile
Alors que le vent met les voiles
Aux vacanciers
« Laisse-moi donc je suis tranquille
Je veux profiter de mon île
Sans travailler

J’ai assez croqué de grains d’orge
Fariné jusqu’à rendre gorge
A en pleurer
J’ai fait et leur pain et leur beurre
Et j’espère aussi leur bonheur
A mouliner

Là-bas j’aperçois mon copain
Qui n’a plus de vie en son sein
Tout comme moi
Mais qui s’éteint tous les matins
Et s’allume entre loup et chien
Le pauvre gars

Le roi n’était pas son cousin
Il n’aurait pas passé la main
Pour un empire
Mais qu’il devienne un mort vivant
Un zombie passé hors du temps
C’est encore pire

Il se prenait pour Pharaon
Pour le roi de la Créac’hion
Comme il disait
Mais dressé jailli des bruyères
Il était grand il était fier
Et le savait

Le soir venu de sa lumière
Il repeignait la nuit en clair
Et c’était beau
De savoir qu’un homme de chair
Veillait sur l’humeur de la mer
Et les bateaux




Crêpe-uscule

La mer est d’huile
Le ciel est d’eau
Mais où sont passés les oiseaux
La mer est d’huile
Le ciel est d’eau
Ils ont voulu monter trop haut

Sur la mer d’huile
Le ciel d’en haut
Lui-aussi reflète des îles
Des îles de ouate
Et des îles d’eau
Qui s’endorment au soir écarlate

Douces idylles
Grands idéaux
Bousculés par le temps qui passe
Belles sibylles
Beaux généraux
Vous venez de perdre la face



lundi 14 février 2011

Bravery

En deuil voici mes goélands
Si le cormoran s’en bat l’œil
C’est qu’il était noir bien avant

Ce joueur « Olympic » du malheur
Vient de s’épancher de bon cœur
Larmes noires sur mes rochers

Je téléphonais à ma mer
Quand son appel prioritaire
M’empêcha de communiquer

Alors est tombée sa colère
SOS ou pas il est clair
Qu’elle n’aime pas être coupée

Et le tanker en deux morceaux
A continué de prendre l’eau
Pendant des années chez ma mer

« Par bonheur tu n’étais pas plein »
Lui dit-elle encor le matin
En lui servant un autre verre





dimanche 13 février 2011

Les brigands

Mollelaine et Fouettesang
Sont les deux brigands de l’Iroise
Leur dur regard au large toise
Les bateaux qui au large croisent
Sans voir le danger qui attend

Mollelaine dit à Fouettesang
Ne vois-tu la grosse pansue
Belle replète aux flans tendus
Qui fend le flot sombre et moussu
Bon Sang mais qu’est-ce que tu attends !

Mollelaine dit à Fouettesang
Avec deux pinces comme les tiennes
Ca fait longtemps qu’à cette chienne
J’aurais fait une césarienne
Que j’aurais sucé tout son sang

Fouettesang dit à Mollelaine
Ca te va bien de conseiller
Cette crevette est en acier
Aurais-tu déjà oublié
Espèce de chauve tire-laine !

Mollelaine dit à Fouettesang
Tu confonds crevette et baleine
De l’acier tu dis quelle aubaine
Plus fragile que la porcelaine
Tu te fais vieux mon vieux brigand !

Fouettesang dit à Mollelaine
Je sais ce qui fait ses entrailles
Qu’il les garde loin et s’en aille
Qu’il s’appuie sur son gouvernail
Il a bien trop mauvaise haleine

Fouettesang dit à Mollelaine
Naufrageurs ou petits enfants
Surtout jamais ne te méprends
Je n’oublie pas le goût du sang
Qu’ont les hommes quand ils se déchaînent




samedi 12 février 2011

Présalé

Le temps a posé sur la lande
De gros tas de laine bêlante
Qui se promènent en dilettante
Broutant le sol rasé de près

Ils louvoient et vont naviguant
Entre genêts et korrigans
Pendant que les gris goélands
Au-dessus d’eux leurs crient après

Ils sont noirauds ils sont tout blancs
Ils sont les deux en même temps
De doux agneaux au cri tremblant
Jouent les cabris et c’est parfait

Les vrais cabris eux cabriolent
Pendant que leur maman frivole
Bêlante un tantinet s’affole
Toujours à leur courir après

Deux trois rayons parcourent la mousse
Entre les museaux qui se poussent
Pour prendre le meilleur en douce
Du plus gras des brins de panais

Plus haut un gros joufflu tout gris
Souffle son air et son mépris
Des chapeaux et des parapluies
Les ajoncs plient dans les marais

Et les mouettes sur cet air danse
En plongée où tous ils s’élancent
Les fous se remplissent la panse
Les cormorans jouent les piquets

Alors qu’égrenés sur la lande
De gros tas de laine bêlante
Se baladent en dilettante
Broutant le sol rasé de frais





vendredi 11 février 2011

Ambiance

Sur la lande le mouton court
A perdre la laine
Dans la brume le bateau corne
A perdre haleine
Le goéland en devient sourd
Et se déchaîne
En piquant vers les salicornes
Au milieu des baleines à cornes

Sur la grève le mouton meurt
Vagues s’enchaînent
Renaissant mille fois dans l’heure
Vagues sans chaînes
La mousse crisse les graviers glissent
Et se démènent
Bulots bigorneaux se bigornent
Au son velouté du cromorne

Flottant sur l’air le mouton court
Le souffle court
A raz des mottes flaques et gours
L’essoufflé court
Bruine fine fait des senteurs
A toute vapeur
Pendant que le Fromveur s’échine
A repousser le cours des heures

Dans la marmite le mouton cuit
Près des bigotes
Il mijote au milieu des mottes
Sous la « big » hotte
Pendant que les mains jointes elles prient
Les âmes errantes de leur mari
Que la mer leur a pris trop tôt
Sont cuits aussi les haricots